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Sidi Ahmed Ou Moussa

Sidi Ahmed Ou Moussa



Abou Al-Abbas Ahmed-Ou-Moussa Al Jazouli Al Semlali naît vers 1460 chez les Ida Ousemlal dans l’Anti Atlas.

Il étudie pendant de nombreuses années à Marrakech auprès de grands maîtres, ensuite, très longtemps, il va voyager, peut-être jusqu’en Orient. En 1521, il retourne dans le Souss, à Ilmatene et s’installera plus tard dans le Tazeroualt où il mourra en 1563. Depuis lors, il est resté un des Saints les plus renommés chez les Chleuhs qui le connaissent surtout par la troupe d’acrobates de Sidi Ahmed-Ou-Moussa.

Sidi Ahmed-Ou-Moussa était un homme très simple qui attachait plus de prix à l’intuition et à la mystique qu’au raisonnement, à l’érudition et à la connaissance de la langue arabe.

Un jour que Sidi Ahmed prêchait à son cercle d’auditeurs, sa langue l’ayant trahi lui fit faire une faute grammaticale. Entendant cela, l’un de ses contributes, aâdel à Taroudant, se dit en lui-même : » Quel Cheikh nous aurions là s’il savait seulement un peu de grammaire ! ». A peine eut-il cette pensée que le Cheikh se tourna vers lui, répéta le Hadite sans faute et dit avec simplicité : « Voilà que j’ai mis l’accusatif sans savoir la grammaire ! ». Et il ajouta : « La langue qui vocalise les mots, elle périra ! Dieu veuille qu’elle soit sauvée au jour du rassemblement ! A celui qui n’aura pas de pitié, à quoi servira la grammaire ? Et quel tort un langage barbare ( toute langue différente de l’arabe ) pourra-t-il faire à un homme pieux ? ».

Cette priorité donnée à l’esprit de piété nous éclaire sur le fait qu’il ne fonda ni de confrérie ni de zaouïa. Quand on lui demandait pourquoi il refusait d’avoir des disciples et de fonder une zaouïa, Sidi Ahmed répondait en posant un doigt sur sa tempe : « Celui qui regardera là entrera au Paradis » (= Contentez vous de suivre mon exemple ). Ou encore : « Nul n’accomplit son affaire en ce monde et nul n’y atteint son désir ;; ;Quel malheur d’être esclave de ce bas-monde et de l’argent ! ».

Sidi Ahmed-Ou-Moussa était un homme d’une grande renommée, son influence religieuse était immense et lui donnait une autorité presque absolue. On venait même de l’Orient pour visiter le Saint du Tazeroualt.

Dès l’avènement du Sultan Moulay Abdallah en 1557, des relations personnelles s’étaient établies entre lui et Sidi Ahmed. En effet, le Sultan avait souhaité avoir un chef spirituel et chargea un émissaire de trouver le meilleur des Cheikhs du Maroc. Celui-ci, après de longues recherches revint au palais et dit du Saint de Tazeroualt qu’il était l’homme le plus illustre, le plus humble et le plus pieux qu’il avait rencontré et que c’était lui qu’il fallait.

Le Sultan se mit alors en route pour le rencontrer et lui demander d’être son intercesseur auprès de Dieu et de lui faire obtenir la possession de son royaume sans luttes ni combats et d’affermir sa puissance car il ne se sentait pas en sûreté. Sidi Ahmed fit alors une invocation en sa faveur : « O Arabes ! O Berbères ! O plaines et montagnes ! Obéissez au Sultan Abdallah et n’ayez pas de querelle avec lui ! ».

Ayant obtenu cette protection, le Sultan resta trois jours puis repartit vers Marrakech.

Quelques temps après, Sidi Ahmed-Ou-Moussa se rendit à Marrakech en visite pieuse aux Saints de la ville où il eut droit à un bain de foule du peuple qui voulait le voir et recevoir sa Baraka. Apprenant cela, Moulay Abdallah l’invita au palais pour un grand dîner au cours duquel le Saint ne mangea rien. Plus tard, quand on lui en demanda la raison, il répondit : « Qui prend le repas du Sultan, même licite, fait tort à son cœur pour quarante jours. Si ce qu’il mange est douteux, il aura le cœur mort pendant quarante ans ». On peut penser qu’il eut cette réaction en raison de la débauche du Sultan ou de son entourage.

A cette époque, Sidi Ahmed-Ou-Mousa était vénéré aussi bien par les Arabes que les Berbères. L’antagonisme entre ceux-ci était assez vif dans le Sud et le Saint réussit souvent à apaiser les tensions par son aura. Voici la scène :

Un conteur arabe et ses auditeurs sont assis en cercle autour de lui. Si le conteur et son assemblée sont arabes, quelques-uns dans le cercle sont des Berbères. Sidi Ahmed-Ou-Moussa s’approche d’eux tous et leur dit en riant : « O les Arabes ! Racontez-nous donc quelque chose d’arabe ! ». Entendant le Cheikh s’adresser ainsi aux Arabes, les Berbères murmurent entre eux, disant : « Les Arabes nous l’ont pris ( c’est-à-dire, les Arabes ont détourné de nous notre Saint ) ». Le conteur entend cette réflexion et, allant dans le même sens, il dit à ses compagnons arabes : « Vous autres ! Parlez donc de vos affaires ! ( Comme Ahmed-Ou-Moussa vous le demande et sans vous soucier de ces Berbères qui doivent se tenir à l’extérieur du cercle ) ». Entendant ces paroles de division et de ségrégation, propres à raviver les discordes raciales, le Cheikh intervient aussitôt, disant : « Mes amis ! Dans cette assemblée qui est la nôtre, il n’y a pas de bord ; c’est le milieu partout, du trône jusqu’au tapis ».

Par ces mots, Sidi Ahmed-Ou-Moussa entend signifier qu’Arabes et Berbères sont égaux et ne forment pas de factions adverses, il ne peut donc exister de préséance entre les uns et les autres et la concorde doit régner entre eux.

Toute la vie de Sidi Ahmed-Ou-Moussa nous enseigne qu’il ne rechercha jamais le pouvoir temporel. Il fut un homme de grande vertu qui ne s’opposa jamais au Makhzen malgré ses travers et qui permit au Sultan de maintenir son autorité sur les tribus du Sud de par son influence spirituelle.

Le mausolée de Sidi Ahmed-Ou-Moussa, la zaouïa ( fondée après sa mort ) et la mosquée se trouvent, de nos jours, à quelques kilomètres à l’Est d’Iligh.



12/10/2007
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