CHAPITRE VI Mokhtar soussi
CHAPITRE VI
Relations enseignants / enseignés.
Au sein de chaque groupe humain il y a des relations qui se tissent et des échanges qui se font. Le cas de l'enseignement traditionnel ne fait pas exception. Mais ces relations se colorent suivant les traditions, la personnalité et la psychologie des enseignants et des enseignés.
1- Les acteurs de l'enseignement traditionnel.
1-1 L'amhdâr.
C'est l'élève qui vient de commencer son apprentissage dans la mosquée ou la médersa coranique. Toutes les familles soussies désirent ardemment que leurs garçons fréquentent les lieux d'enseignement dans le but de mémoriser le livre saint. L'amhdâr, l'aspirant au savoir religieux est bien considéré dans la société. Il n'est pas un Raïs berbère, (chanteur) qui n'en ait pas parlé à travers ses chansons.
D'ailleurs, il jouit d'autres prérogatives même lorsqu'il sera dans l'autre monde, où il pourra demander à Dieu de pardonner à ses parents envoyés en enfer.
Il est donc le grand espoir de sa famille et doit obéir à son enseignant en toutes circonstances.
1-2 Le taleb.
Ce terme peut désigner l'étudiant qui a mémorisé par coeur le Coran et poursuit encore ses études, dans un second niveau à la médersa 'atiqa (des sciences religieuses) comme Il peut aussi désigner l'enseignant du premier niveau de la mosquée ou de l'école coranique.
a - Le taleb étudiant.
Le taleb étudiant est déjà apte à diffuser son acquis coranique si sa situation financière le contraint à quitter les études du 'ilm dans les médersas ou zaouia. Il se peut aussi que sa tribu lui demande de venir s'engager à enseigner les enfants en le rétribuant pour ses services !
Dans le cas contraire, il se consacre à la quête du savoir en se déplaçant entre les médersas dans la région ou à l'extérieur, comme ce fut le cas de Mohamed Al-Mokhtâr Al-Soussi. Et d'ailleurs pour accéder à la médersa 'atiqa, la seule condition qu'un taleb étudiant doit remplir est d'avoir appris par coeur tout le Coran.
Le taleb étudiant est respecté par toute la population, car il porte en lui dans sa poitrine (fi sadrihi) la parole de Dieu (awal n'rbbi).
Ce respect lui est accordé dès sa première sloukt ou première lecture du Coran en sa totalité, qui consacre sa promotion du rang d'amhdâr à celui de taleb. « A l'époque dans le Souss, quand l'amhdâr avait achevé la première lecture du Coran, les gens le vénéraient et portaient sur lui de grands espoirs.[...] Personne ne parlait en sa présence sans son autorisation.[...] Quand il allait au souk, il ne se mêlait pas à la foule. On venait le voir à l'ombre sous les arbres»
b - Le taleb enseignant.
Le taleb étudiant qui a bien maîtrisé le Coran tant au niveau de la lecture, de l'écriture, que des éléments de base concernant les pratiques du culte religieux, peut exercer la fonction d'enseignant dans la tribu qui le lui demande par le contrat du chard.
1-3 Le faquih.
C'est l'enseignant érudit qui peut atteindre le degré du 'alim ! Le champ de ses connaissances et de son savoir est plus large que celui du taleb. Il a la capacité d'interpréter le texte coranique. C'est pourquoi Al-Mokhtâr dit : « Les gens de ce pays n'appellent faqih que celui a acquis et maîtrisé le 'ilm ».
Contrairement au taleb enseignant qui peut enseigner sans condition, un faqih ne peut exercer l'enseignement qu'après avoir obtenu la ijazat de ses chouyoukh. « Qu'il reconnaisse la baraka de s'identifier aux chouyoukh qui ne mettent leurs pas dans l'enseignement, les métiers légaux et autres tâches de grande importance, que par la ijazat et l'autorisation des chouyoukh»
2- Relations enseignants / enseignés.
Ces relations diffèrent selon le niveau d'enseignement. Le taleb est beaucoup plus directif envers les imhdâren, tandis que le faqih reste relativement tolérant, mais en général, nous pouvons dire qu'il s'agit de l'autorité de l'enseignant et de la soumission de l'enseigné.
Nous allons essayer d'observer ces relations dans les diverses interactions entre les acteurs de l'enseignement traditionnel Soussi, et vis-à-vis d'autrui.
2-1 L'image de l'enseignant.
Qu'il s'agisse du faqih ou du taleb, l'enseignant est l'exemple de la perfection en éducation et en 'ilm. Il est le père spirituel qui dispense et le savoir et la bonne conduite en s'acquittant de sa mission religieuse, car les oulémas sont les héritiers des Prophètes.
Cette mission noble et difficile, impose à l'enseigné le devoir de respect et d'estime pour son maître et son entourage. « Fait partie de sa vénération, le respect des membres de sa famille ».
Il doit être respecté plus que les parents biologiques il mérite obéissance et soumission. L'enseigné doit se montrer devant lui sage et très docile, surtout au moment du cours durant lequel il ne doit pas bouger. Il doit éviter tout ce qui peut provoquer la colère du maître, car celui qui lui porte atteinte ne goûtera point la baraka de son 'ilm.
L'enseigné ne doit pas, par respect, s'asseoir à la place de son maître, même en l'absence de celui-ci. Mais s'il boit dans son verre, il héritera de lui le 'ilm .
Al-Mokhtâr rapporte « Il m'a ordonné de lécher sur ses doigts Al-bsiss (farine mélangée avec de l'huile) qu'il a distribué aux tolba. Je l'ai léchée et cela a influencé mon coeur et mon ambition. Quand j'ai quitté sa médersa, il m'a accompagné à pied sur une bonne distance et m'a souhaité beaucoup de bien ».
Il rapporte aussi une autre image allant jusqu'à un certain degré de sacralité « A chaque fois, nous buvons les restes de l'eau avec laquelle il a fait ses ablutions, pour solliciter sa baraka ».
Les confréries répandues dans le Souss, n'ont pas manqué d'influencer les relations entre les enseignants et les enseignés. L'élève doit être devant son maître comme le mort devant celui qui procède à sa toilette. Il ne doit faire signe d'aucune résistance : on pense à la règle « périnde ac cadaver » des jésuites. « Sois devant lui [cheikh] comme le mort devant son laveur qui le manipule dans tous les sens ».
Le respect pour l'enseignant de la part des enseignés reste permanent, même lorsque celui-ci a atteint un âge très avancé. Il est considéré comme le père spirituel qu'il faut constamment vénérer, qu'il soit présent ou absent.
Mais, il y a ceux qui se révoltent contre cette soumission aux chouyoukhs, surtout quand ils se sentent plus savants qu'eux. A ce propos, Al-igrâri rapporte : « Parmi eux, Mohamed Igguig (tonnerre) à Irsmouken, [tribu] un faqih actif et brillant en calcul. Il prétend n'avoir aucun cheikh oubliant que pour celui qui n'a pas de cheikh, Satan en est un pour lui. Il déclare qu'il n'y pas un 'alim dans le Souss plus érudit que lui. Et, ne cessant de critiquer les chouyoukh des confréries religieuses, il est devenu fou vers la fin de sa vie en se déshabillant et en marchant nu, que Dieu nous protège ! Il préférait [mars à vénus] malgré son attachement aux awrad et à la prière».
Nous soulignons que les relations entre le faqih et les tolba ne s'interrompent pas, même lorsque ceux-ci ont quitté la médersa. Les liens restent permanents par des visites ou par des correspondances chargées de conseils et d'orientations concernant l'enseignement ou les différents aspects de la vie en général.
Voyons à titre indicatif deux lettres illustrant ces relations :
A ) Correspondance concernant l'enseignement.
Lorsque l'érudit Mohamed ben S'id Al-Marghîtî a appris que son élève Al-'aroussî ben Abdellah Al-Jrrârî a construit une médersa pour la diffusion du 'ilm, il lui a envoyé une lettre pleine de conseils en insistant sur les défauts [ de morale] des médersas soussies, défauts qu'il faut éviter ainsi que comment choisir les Tolba étudiants qui ont la vocation pour les études « J'ai appris que vous avez construit une médersa pour les tolba afin que vous vous entraidiez en obéissant à Dieu, et nous avons remercié Dieu pour cela si vous appliquez l'ordre divin :'Entraidez-vous dans l'accomplissement des bonnes oeuvres et de la piété et ne vous entraidez pas dans le péché et la transgression. Craignez Allah, car Allah est dur en punition! . Nous prions Dieu qu'il vous donne la grâce, par la médiation en son Prophète (BSDL). J'ai voulu vous conseiller - car la religion est conseil - d'ordonner aux Al-msâfrîne qui habitent dans la médersa de s'entraider dans l'accomplissement du bien et de s'éloigner du pêché. De tout ce qui est commis par eux, vous y participez, car c'est vous qui leur donnez nourriture et abri ! J'attire votre attention sur ce point qui échappe à tout le monde, sauf à ceux qui sont soutenus par la lumière de Dieu, et nous le prions pour qu'il nous classe parmi eux, amen.[...] Les tolba de nos jours passent des années à maîtriser le 'ilm tout en étant dans le pêché ! Ils s'intéressent aux formalités et négligent le dogme qui est la pulpe. Enfin, celui qui ne s'intéresse pas au culte, ne doit pas habiter votre médersa, c'est mon conseil ».
Nous remarquons que les conseils contenus dans la lettre, insistent beaucoup sur le comportement plus que sur le savoir, car celui-ci, n'est qu'un moyen pour la compréhension de la religion islamique.
B ) Correspondance concernant la personnalité de l'enseignant.
Il s'agit d'une lettre adressée par Al-Mokhtâr Al-Soussi à son élève Mohamed ben Ahmed Al-'atiq, qui se centrait sur la personnalité du faqih Al-Mokhtâr conseille à son élève d'être modeste, de ne par courir derrière la matière et de respecter les sciences religieuses.
Il dit :« La première des choses est une bonne renommée dans l'enseignement, qui ne peut être acquise qu'après une expérience de longue haleine.
La deuxième, est la bonne intention envers Dieu, de vouloir enseigner les enfants des musulmans dans cette région aride du 'ilm, car tout ce qui n'est pas fondé sur la bonne conscience et la fidélité, s'écroule vite. [...] Je n'ai peur que d'une chose pour toi, que le doute s'empare de ta croyance à cause de tes mauvaises fréquentations, fréquentations que nous t'avons interdites à maintes reprises ».
Nous soulignons donc d'après ces lettres, que l'image du faqih est dominante, et les relations entre lui et ses élèves se perpétuent au-delà des frontières de la médersa.
L'enseignant doit être respecté même après sa mort, et l'on doit faire des prières pour lui en le remerciant pour avoir diffusé le 'ilm au sein de sa tribu et de sa société. C'est pourquoi en toute occasion religieuse ou non, avant la dispersion des foules, les fouqaha clôturent tout rassemblement par Al-dou'â ou invocation au profit des parents, des chouyoukh enseignants, des hommes vénérés, des morts et au profit de tous les musulmans qui constituent la oumma islamique.
2-2 L'image de l'enseigné.
Dès son jeune âge, l'enfant est éduqué à se comporter comme un adulte, d'abord par sa famille et ensuite par le taleb et le faqih. Les parents et les enseignants ignoraient tout de la psychologie et de la personnalité de l'enfant. Son seul devoir s'avérait être la soumission à toute personne plus âgée que lui, en partant de ses frères jusqu'aux inconnus, auxquels il devait baiser la main à chaque rencontre.
Nous pouvons dire que, dans la société soussie à l'époque d'Al-Mokhtâr, les enfants étaient privés de leur enfance. L'enfant qui n'était pas envoyé à la mosquée, avait des tâches qui lui incombait dans la maison ou à l'extérieur : aider ses parents, garder les chèvres ou aller quérir de l'eau pour la maison.
Ceci a été bien illustré par une étude « Disons que jusqu'à la fin des années cinquante, l'enfance n'existait pas ou elle existait dans les milieux bourgeois citadins influencés par le modèle colonial, parce qu'à partir de cinq ou six ans l'enfant était tout de suite mis en apprentissage chez le faqih ou chez l'artisan et noyé dans le monde des adultes »
Par ailleurs dans la région du Souss, on habillait l'enfant comme un adulte, et plus encore, on le mariait jeune, tout en lui volant et son enfance et son adolescence.
Donc, l'enseigné amhdâr était le petit qui venait fréquenter la mosquée ou la médersa coranique pour l'apprentissage de l'alphabet, de l'écriture et des petits versets coraniques. Il ne représentait qu'une sorte de pâte à modeler que le taleb façonnait à sa guise. A ce stade de l'apprentissage, les châtiments corporels étaient très fréquents avec le consentement des parents.
Quant au taleb étudiant de la médersa des sciences religieuses, c'était déjà quelqu'un qui avait traversé la phase de l'amhdâr, et qui avait appris tout le Coran, mais il ne comprenait pas le sens de ce qu'il avait appris !! Lui aussi, habité par la peur des lourdes années d'apprentissage, se soumettait à son enseignant, et, même étant plus âgé, il pouvait encore être fouetté en cas de maladresse sans qu'il puisse riposter.
Ses habits devaient répondre aux critères islamiques, souvent une djellaba blanche, en dessous une farajya (vêtement blanc) ou foukya, un sirwâl aqindrissi (pantalon traditionnel marocain) et une taguiya (bonnet) sur sa tête rasée. A l'époque d'Al-Mokhtâr, à cause des famines le tissu se faisait rare, et la nourriture manquait, ce qui entraîna le manque d'hygiène, des phtiriases et même la dispersion des tolba et l'abandon des médersas. Mais quelle que soit la situation, l'enseigné devenait l'esclave de l'enseignant « celui qui m'apprend une lettre, je deviens son esclave » phrase très courante dans les milieux marocains.
En bref, nous pouvons affirmer que la personnalité des enseignés s'anéantissait totalement devant celle de l'enseignant, et les soussis appellent cette attitude : Atâ't ou obéissance et crainte révérencielle, et non pas soumission.
3- Relations enseignés / enseignés.
En général ces relations étaient imprégnées du respect mutuel, surtout quand il s'agissait de niveaux différents. Le taleb respectait son camarade plus avancé que lui dans les études et sollicitait son aide. Il arrivait que le faqih désigne un taleb pour enseigner les moins avancés, et ceux-ci devaient le respecter. Mais quand il était question de remarques concernant les matières enseignées, le moins avancé pouvait corriger le plus avancé en cas d'erreur et ceci sans aucun complexe.
En cas de problème, les tolba essayaient de le résoudre sans que le faqih soit consulté. Il n'était mis au courant que lorsque la tentative de résolution était vouée à l'échec.
4- Relations avec autrui.
Les tolba n'étaient pas coupés du monde extérieur. Ils avaient des relations avec les habitants les plus proches de leur institution et même avec d'autres. En dépit du respect accordé aux tolba au sein de leur tribu, ils essayaient d'éviter les analphabètes appelés localement « I'amyïne ». Le faqih lui-même le leur recommandait, car la tâche qu'ils avaient à accomplir était beaucoup plus noble que de perdre son temps avec les autres plongés dans l'oisiveté.
Mais, à cause des traditions, les tolba pouvaient quelquefois se trouver impliqués dans la participation aux festivités ou aux moussems. « Nous sommes arrivés dans un village où les hommes s'amusaient et dansaient, et les femmes tout autour, comme des sauterelles, toutes voilées, les regardaient. [...] Lorsqu'ils nous ont remarqués, ils nous ont invités en sollicitant notre baraka et nos invocations »
La baraka des tolba était très connue dans le Souss et on rapporte plein d'histoires à ce sujet. « Le faqih sidi Tâher ben Ali m'a raconté que les tolba de la médersa de sidi Ali ben S'id dans la tribu de Lakhsâs, ont demandé à un riche, habitant près de la médersa, de leur offrir un mouton, ce qu'il n'a pas fait. En partant, les tolba se sont réunis et l'ont couvert d'imprécations pour qu'il périsse et pour que le mouton qui leur a été refusé devienne viande pour le repas de ses obsèques. En trois jours le pauvre homme fut compté parmi les morts. [...] Je dis : Le cheikh soufi sidi Al-hadj Lahcen Tamoudiztî disait : Quand les tolba se réunissent pour une affaire, Dieu l'accomplit. Et sidi Ibrahim ben sâlih Tâzerwâltî disait: Je ne suis stérile que par les invocations des tolba, ils étaient devant ma porte un jour de noce et je ne les ai pas invités, alors ils ont invoqué Dieu pour qu'il me prive d'enfant,et c'est maintenant une réalité».
Nous notons que cette croyance subsiste encore de nos jours dan la région. Elle donne aux tolba un pouvoir surnaturel grâce au Coran qu'ils ont mémorisé. Ainsi quand les gens parlent d'eux, nous n'entendons dire que « sadatna tolba » nos maîtres tolba.
Quand ils se réunissent à l'occasion d'une cérémonie, les gens leur donnent en échange de leurs invocations la zyart ou Al-foutouh, soit en nature tel que du sucre, du thé, des oeufs, un coq, une bête ou en argent. Les tolba procèdent sur place à la vente aux enchères des choses reçues. Un oeuf au prix d'un dirham, peut coûter cent dirhams, car ce n'est plus le même oeuf qu'ils viennent de recevoir ! Les tolba le chargent d'invocations et de la baraka sous les applaudissements de la foule, en vendant à l'acheteur- selon ses voeux- la réussite dans son commerce, son ménage, et s'il est étudiant, dans ses études etc. S'il s'agit d'une vieille fille, l'objet acheté aux tolba, peut attirer un mari qui frapperait à la porte de ses parents. Nous avons même entendu parler, à un certain moment, que des tolba vendaient en leurs objets la baraka pour l'obtention d'un passeport et surtout d'un visa pour l'Europe.
Al-Mokhtâr a fait allusion sans détail à ce phénomène « Ils [les tolba] font des tournées en adouwal (groupe) dans les tribus à l'instar des chefs des confréries religieuses, en s'adonnant à la mendicité et en escroquant les naïfs ».
5- Les sanctions.
La sévérité des sanctions était observée dans les mosquées et les médersas coraniques plus que dans les médersas 'ilmyas, où les tolba étudiants était plus âgés et barbus. Durant la période de la mémorisation du Coran, les imhdâren étaient plus exposés aux châtiments corporels, et les parents n'étaient satisfaits du travail de l'enseignant qu'ils ont engagé, que lorsque leurs enfants revenaient à la maison, tachés de sang.
Ils acceptaient volontiers ce traitement infligé à leur progéniture, car tout endroit du corps fouetté par l'enseignant échapperait au feu de l'enfer. Si en d'autres régions du Maroc, un père dit au faqih à propos de son fils « anta aqtl wa ana ndfn » toi, tu tues moi j'enterre, dans le Souss, un père dit au faqih « kiy gherssâs nkki azought » toi, égorge-le, et moi je le dépouille, nous pouvons imaginer à quel point l'enseignant pouvait torturer ses élèves, avec ou sans raison, sans en craindre les conséquences . « ...Et nous avons trouvé la mosquée pleine d'enfants, grands et petits, occupés à apprendre devant un faqih sévère à l'image d'un lion. Il ne cessait pas de frapper, de ligoter, et de lancer des cailloux sur eux, sans égard pour les parties du corps qu'il frappait. Il les frappait particulièrement sur la tête en laissant couler le sang sur leurs vêtements. Il n'y en était pas un qui eût moins de cinq blessures à la tête, sans compter celles du dos. S'ils se retournaient à droite ou à gauche, la mort rouge était aux aguets »
Les visiteurs de ce faqih lui ont fait des représentations sur ce qu'il leurs avait été donné de voir et lui ont conseillé de faire preuve de plus de tolérance et d'être plus pédagogue avec les enfants. L'homme leur répondit « Si leur parents ne trouvent pas sur leur corps les traces des coups, et leurs vêtements tâchés de sang, ils me feront des reproches. Il arrive souvent qu'un parent m'appelle de loin à haute voix de derrière la mosquée en me disant : Frappe mon enfant. Il est silencieux et il joue ».
Fortifiés par cet encouragement reçu des parents, certains enseignants faisaient preuve d'imagination pour punir. Ils ont inventé des systèmes de torture comme s'ils avaient affaire à des criminels ! « La plupart [des enseignants] quand ils veulent les [ enseignés] torturer, procèdent à leur suspension dans l'air à l'aide de pieux et de cordes, et allument en bas un feu brûlant.[...] Certains y jettent du sel qui explose en faisant des étincelles atteignant le corps du malheureux suspendu.[...] Les cordes laissent des traces sur leurs mains. Quels coeurs durs, et vides de toute clémence ! Nous sommes à Dieu et à lui nous retournons !! Ces agissements amènent la plupart des enseignés, voire la totalité à exprimer leur joie quand on leur annonce le décès de leur enseignant. Il y a même des enseignés qui ont tué leur enseignant pour être tranquilles. Pourquoi toute cette brutalité entre enseignant et enseigné ? Dans quel but ? C'est juste de l'ignorance et de la barbarie. En outre, des parents recommandent au maître de bien fouetter leurs enfants, et s'ils sont morts, le maître est innocent, et c'est devenu une coutume relationnelle entre parents et enseignants, ce qui met réellement les enfants en grand danger.
Tout ceci n'est fondé que sur un dicton courant qui affirme que le bâton est issu du paradis « Akouraï ikkâd ljinte » et sur la croyance qu'on ne mémorise le Coran que lorsqu'on a goûté du bâton. Ils ont oublié que c'est Dieu qui a enseigné le Coran et a facilité son apprentissage »
Nous notons également que certains parents faisaient exception et n'acceptaient pas ce genre d'éducation « En ce qui concerne sidi Abdellah, le faqih sidi Ali ben Hmmou l'a frappé avec une louche en fer qui servait à prendre de l'eau pour les ablutions d'une grande tikinte, marmite dans la mosquée, et l'a profondément blessé. Sa mère a réagi contre le faqih, et son père n'a pas manqué de lui adresser des reproches : Nous voulons l'enfant pour la vie et non pas pour la tombe ! Quelle est l'utilité de la torture pour apprendre le Coran ? ».
Ainsi telles étaient l'attitude et la vision de la grande majorité de la population soussie quant à l'éducation de leur progéniture confiée aux tolba et aux fouqaha. Et pour que l'image soit complète, voyons aussi la position de l'élite à travers une lettre adressée à un faqih :
« ... Et après, te voici mon enfant Abderrahman, que Dieu exauce en lui et en toi notre espoir. Empêche-le de sortir avec les enfants et les grands dans les champs. Il ne doit sortir que pour faire ses besoins. Personne ne doit l'accompagner à la maison à part toi. Il ne doit pas s'asseoir avec les grands enfants et les autres. Offre-lui une bonne éducation : Qu'il baisse les yeux, qu'il ne parle pas trop. Qu'il boive et qu'il mange peu ! Pas de rires ! Il ne doit pas lever les yeux devant toi, et ne doit te parler que pour demander une explication. Ne laisse personne lui parler, même ton propre enfant, et, celui qui veut lui donner quelque chose, qu'il te l'apporte. Il ne doit manger qu'après avoir faim, car nourriture après nourriture provoque de grands dommages. La faim est plus utile. Il ne doit pas trop boire. Il ne doit boire qu'une heure après avoir mangé. Que personne ne lui parle de ce pays pour perturber son esprit !
Ne lui parle pas avec douceur, fais-lui peur dès le premier contact, afin qu'il ait peur de toi, et ensuite sois clément.
Commence-lui sa planchette par le début de la sourate Al-Baqara (la vache) Apprends-lui l'écriture et comment lire rapidement sans répétition des mots. Il doit relire sa planchette après l'écriture. La correction se fait l'après-midi. Qu'il fasse une petite sieste avant la prière de Al-zouhr. Chaque fois qu'il lève les yeux de sa planchette pour voir ou discuter, réprime-le. Retrousse tes manches pour exécuter ton devoir envers les enfants des habitants de la région. Que mon enfant ne t'en empêche pas ! Eduque-les à ne pas mentir ni jurer. Il ne doit ni manger ni boire avant de prononcer le nom de Dieu, et le remercier à la fin. Il doit aussi le prononcer avant de se coucher, quand il entre et quand il sort. Tu ne dois pas le laisser manger tout ce qui est impur (harâm) car toute chair faite par l'impur mérite l'enfer. Il ne doit pas sentir ta clémence et ta compassion, cache-les pour lui.[...] Une gifle vaut mieux qu'une bouchée. Ne le laisse pas se montrer orgueilleux ou offenser les enfants même en paroles. Nous ne l'avons [l'enfant] voulu que pour la modestie, que Dieu te récompense, réalise tes aspirations et les nôtres dans ce bas monde éphémère et dans l'autre qui est éternel.
Ne l'envoie chez nous qu'après avoir reçu mon accord, et s'il vient sans ton autorisation, rattrape-le sur le chemin et donne-lui des coups de là[ l'endroit de la capture] jusqu'à l'arrivée.
C'est ton enfant, et je t'ai donné à son sujet une procuration générale. Ne divulgue ses secrets en apprentissage ou autres à personne. Si quelqu'un te demande de ses nouvelles, dis-lui : Nous lui souhaitons du bien. Que Dieu lui vienne en aide, à lui et aux autres par ton intermédiaire, et augmente les bienfaits au sein des musulmans, amen ».
C'est une lettre qui met en relief les aspects des relations entre l'enseignant et l'enseigné selon la vision d'un père faqih qui avait envoyé son enfant à un autre faqih pour son enseignement et son éducation. Elle met en lumière la mentalité courante et la réalité vécue par les acteurs de l'enseignement traditionnel soussi.
Ce fut donc la coutume connue dans tout le Souss. Les Imhdâren étaient torturés sans pitié et faisaient des cauchemars la nuit en appelant leur mère, en criant ou en récitant le Coran dans leur sommeil.
Pour approcher cette réalité amère à laquelle ont goûté ceux qui l'ont vécue, nous nous permettons de nous interroger sur un certain nombre de points : Quelles peuvent être les causes du châtiment ? Quelles sont ses formes ? A-t-il des buts précis ? Et enfin, n'y a-t-il pas de conséquences négatives qui en découlent ?
A ) Les causes du châtiment corporel.
L'enseignant punit sans clémence, ni compassion tous les élèves qui n'ont pas appris le contenu de leur planchette. Il exerce sur les petits ce qu'il a reçu lui-même quand il était élève. Il ne se réfère ni à la pédagogie ni la psychologie de l'éducation pour déceler une tare quelconque chez l'enseigné. Son seul remède à la situation, est son bâton !!
La personnalité de l'enseignant peut être aussi la cause, s'il exerce de la violence sur les enseignés c'est qu'il est persuadé que le 'ilm ne se transmet que par la force.
La cause peut être une absence non justifiée, le manque d'une prière ou le sommeil.
Diverses fautes commises par les enseignés, telles que le vol, les mauvaises fréquentations ou autres, sont suffisantes pour se voir infliger la torture.
B ) Les formes du châtiment :
Le châtiment corporel infligé par l'enseignant traditionnel peut prendre plusieurs formes, allant d'une simple punition à la mort de l'enfant, ce que l'islam récuse catégoriquement.
Parmi ces formes, nous pouvons citer :
Des cordes tressées et imprégnées d'eau salée qui laissent des contusions sur le corps de l'enfant et augmentent l'intensité de la douleur par la pénétration de l'eau salée dans les blessures.
Des bâtons de toutes formes et des rameaux provenant de certains arbres, dont la consistance varie entre la rigidité et la flexibilité et utilisés n'importe comment, causant parfois des dégâts irréparables, allants jusqu'à crever un oeil ou casser un bras.
Des gifles et des coups de pied, surtout quand l'enseigné a le malheur de se trouver à proximité du taleb ou du faqih lors de la récitation par coeur de sa planchette.
Une autre forme très connue, des anciens étudiants de l'enseignement traditionnel, consistait à pincer la peau sous le menton avec le pouce et la pointe de la plume en roseau en laissant couler du sang.
Quand la colère s'emparait de l'enseignant, il arrachait la planchette à l'élève et s'en servait pour le frapper sur le crâne !
La suspension, appelée Zarga. Elle consiste à attacher les deux bouts d'une corde à une poutre du plafond, puis à soulever l'enfant de force à l'aide des autres élèves et à le forcer à croiser ses doigts au milieu de la corde suspendue et à le lâcher. L'enfant, sous le poids de son corps ne peut pas se libérer et reste suspendu. L'enseignant procède alors, sans merci, à la torture du petit corps, en lui donnant des coups sur les pieds, sur le dos et le reste du corps. Certains enseignants mettent sous son corps des brasiers et y jettent du sel provoquant des petites cloques Le faqih ne se décide à libérer l'enfant que lorsqu'il le voit sur le point de défaillir.
Achbbouh : Procédé qui consiste à faire soulever l'enfant à punir par quatre grands gaillards, en le tenant par les mains et les pieds, le ventre et la face vers le sol. Le faqih alors fouette son dos, ses fesses, ses cuisses et ses jambes. Quand approche la fin de la séance de supplices, on entend s'élever la clameur : « rzmatâss » « relâchez-le ! ».
Al-kabl : l'enchaînement. L'enfant fuyard de la mosquée ou de la médersa coranique, à cause des tortures, reste enchaîné, durant des jours, en étudiant, en mangeant et en dormant.
C'est ainsi que les tolba et les fouqaha de l'enseignement traditionnel mettaient au point diverses tortures à infliger aux enfants avec l'aval des parents, en justifiant même parfois leur comportement par des poèmes ou maximes :
Ne regrette jamais de frapper les enfants.
Le 'ilm reste et les coups s'en vont.
A ce propos Al-Mokhtâr rapporte : « Ce sont ces punitions violentes que les tolba enseignants infligent et que l'opinion publique ne dévoile pas, qui poussent certains enfants à fuir ou à se suicider en se jetant dans un puits ou en absorbant du poison. Il est rare de trouver un étudiant qui n'ait pas pris la fuite d'un endroit ou d'un autre, parmi tous ceux qui ont appris le Coran. C'est uniquement à cause des mauvais traitements, et non pas à cause de l'apprentissage. La fuite engendre une autre sanction qui est le ligotage. Ainsi, nous trouvons dans chaque mosquée un ou deux élèves ligotés par les parents dans le but de les obliger à étudier, et j' en étais un.
J'ai pris la fuite de chez notre maître sidi Ibrahim ben Al- hadj, lorsqu'il nous enseignait dans la mosquée Iferyân à Achtouken, un jour l'après-midi, en direction de la tribu de Gsîma. J'ai parcouru 40 km sur la côte, et je n'avais que 9 ans. J'ai rencontré un homme noir qui m'a conduit à une mosquée. [...] L'imâm m'a reconnu et m'a conduit chez lui à la maison, et là, mon maître m'a récupéré. Pour montrer son zèle envers son cheikh [mon père] Il m'a enchaîné ainsi que mon frère Ahmed avec une même chaîne et nous a dit: Si vous voulez rester, restez tous les deux, et si vous voulez fuir, fuyez tous les deux ».
Telles étaient les sanctions dans l'enseignement traditionnel à l'époque d'Al-Mokhtâr. Tout le monde imposait à ces enfants la mémorisation du Coran par tous les moyens. « Que Dieu ait en sa miséricorde l'âme des gens qui ont vécu à cette époque! Aujourd'hui, il n'en reste plus que des souvenirs, et le Maroc est aux portes d'une ère nouvelle. Seul Dieu sait quelle sera la situation ».
Il faut noter que les seuls objectifs attendus des sanctions exagérées, se résumaient à la mémorisation du Coran, et la bonne conduite suivant les valeurs admises par la société soussie, dont la plus apparente était la soumission.
C ) Les conséquences des sanctions.
Au-delà des conséquences immédiates comme le suicide, la fuite ou les dommages corporels, l'enfant reste atteint et frustré sur le plan psychologique.
Ibn Khaldoun a consacré tout un chapitre à ce sujet dans sa mouqadima, en évoquant les traces négatives et indélébiles touchant au corps de l'enfant et à sa psychologie. Il rapporte que celui qui a été éduqué dans la coercition se montre paresseux, menteur, hypocrite et rusé. Il perd le sens de l'humanité et devient un fardeau pour la société.
Nous soulignons qu'Al-Mokhtâr n'a rapporté aucun cas de sanction exercée par un faqih soufi, qui éduquait ses disciples et enseignait ses tolba simultanément.
Nous notons également que, d'après nos informateurs, ce genre de pratiques barbares a disparu des institutions traditionnelles, et ce, grâce aux changements qu'a connus la société soussie, et surtout grâce à la concurrence des écoles de l'enseignement public qui reçoivent la majeure partie des jeunes enfants. L'enseignant traditionnel n'a aucun intérêt à fouetter les quelques petits qui lui sont confiés, et s'il se laisse aller à le faire, la réaction des parents ne tarde pas à se faire entendre.
6- Al-ijâzat Al-'ilmya.
Elle constituait un autre genre de relations et attestait le savoir transmis de l'enseignant à l'enseigné. Il s'agissait d'une sorte de certificat qui rendait compte des divers modes de transmission du savoir, par voix orale ou écrite, inspirés des oulémas du hadith.
Ainsi, une fois que l'étudiant avait fini ses études, il sollicitait de son cheikh une ijâzat pour qu'il puisse à son tour continuer la chaîne de transmission du 'ilm, car la ijâzat était considérée comme le témoignage du cheikh sur la capacité de son disciple à enseigner.
Nous soulignons qu'elle peut prendre plusieurs formes :
Il peut s'agir d'une ijâzat orale, par laquelle le cheikh autorise son disciple à transmettre tout ce qu'il a appris de lui.
Elle peut être écrite, quand le cheikh écrit que son disciple est apte à enseigner tout le savoir qu'il lui a transmis, savoir provenant de lui et des autres chouyoukh morts ou vivants.
Enfin, il y a la ijâzat qui se fait par correspondance entre le cheikh et le disciple, comme ce fut le cas, à titre d'exemple d'Abderrahman Al-Jazoulî quand il a écrit à son cheikh Ahmed Al-Sanhâjî en disant « Comme je n'ai pas pu le rencontrer pour avoir son ijâzat orale, Je lui ai écrit... Le pauvre [modeste] Abderrahman vous demande, par la grâce de Dieu, de lui autoriser de transmettre votre isnâd des hadiths... Il m'a répondu par l'écriture de son fils- à cause de sa vieillesse trop avancée- : 'Je t'autorise à transmettre tout ce qu'il m'est permis de transmettre oralement selon les conditions exigées par les spécialistes'»
Un autre exemple fut celui d'un cadi, ancien élève d'Al-Mokhtâr Al-Soussi, qui écrivit à ses chouyoukh pour avoir leur ijâzat. Après l'avoir obtenue, il écrivit à Al-Mokhtâr Al-Soussi, à Mohamed ben Omar Al-Sarghini, à Moulay Ahmed 'Alami et au cheikh Abdelhay Al-Kattani, pour obtenir leurs ijâzat, bien que celles-ci n'eussent à l'époque plus grande valeur dans les milieux urbains. Après les avoir obtenues, il les conserva chez lui. Mais, quand les Français ont emprisonné Al-Mokhtâr Al-Soussi en 1937, le cadi a fit disparaître la plupart des documents qui auraient pu lui valoir des ennuis, mais il a précieusement conservé la ijâzat de son maître Al-Mokhtâr.
Al-Mokhtâr a exploité ses ijâzats écrites pour les oulémas dans le monde rural afin de diffuser ses idées concernant l'islam et la situation de la société marocaine. Si les ijâzats que le cadi a reçues de ses autres chouyoukh étaient conformes aux critères traditionnels, celle d'Al-Mokhtâr était autre, et beaucoup plus profonde. Dans l'une, datée du 2 Safar 1354 H (6 mai 1935) Al-Mokhtâr a commencé la ijâzat en écrivant que le monde musulman avait changé, sauf le Maroc, qui restait plongé dans l'ignorance. Que Fès et Marrakech étaient dans un sommeil profond, les oulémas mouraient l'un après l'autre et les sciences religieuses ne suffisaient pas à elles seules pour faire entendre la voix du peuple.
Après cette introduction de son ijâzat, il décrit sa vie, les circonstances de la mort de son père et son parcours à la quête du savoir et du 'ilm. Il a introduit dans son ijâzat ses opinions personnelles et ses méditations, et en donnant ce genre de ijâzat au cadi et à d'autres élèves, Al-Mokhtâr diffusait en réalité sa vision de réformateur parmi les intellectuels ruraux, et ceux des villes du Maroc.
Al-Mokhtâr n'a pas cité les livres qu'il a commentés ou enseignés, du temps où le cadi était son élève, car les ijâzats rédigées durant les années trente ne respectaient que rarement cette tradition. En revanche, il a amplement cité les sujets qu'il a enseignés en grammaire, fiqh, hadith, et exégèse. Ces sujets occupaient dans son enseignement une place beaucoup plus importante que dans celui des autres oulémas.
La conclusion de son ijâzat au cadi Abderrahman, reste exceptionnelle ! Il mentionna qu'Abderrahman n'avait pas acquis les sciences de lui directement, mais plutôt de son frère qui était son élève. Il procéda de la même manière dans d'autres ijâzats, sans doute pour éviter d'exposer ceux qui lui en faisaient la demande à la malveillance des autorités du protectorat qui le tenaient en suspicion et l'avaient déjà envoyé en exil.
Nous soulignons, qu'en comparant le contenu et le style des ijâzats d'Al-Mokhtâr et d'autres fouqaha de l'époque aux ijâzats connues et forgées par la tradition, qu'un changement commença à s'installer dans le domaine de l'enseignement traditionnel qui avait résisté pendant des siècles, le point, que nous allons développer dans les prochains chapitres.