Taroudant et L’ Etat Marocain médiéval :
Taroudant et L’ Etat Marocain médiéval :
· L’époque des Idrissides :
Moulay Idriss II se soucia depuis sa nomination d’ élargir les frontières de l’Etat qu’il hérita de son père en essayant de dominer le commerce transsaharien et de le concentrer vers sa capitale Fès. Pour cette raison, il dirigea ses assauts militaires au Sud vers le pays des Massmouda depuis 197 H et il finit par le soumettre. C’est ainsi que Taroudant entra sous le pouvoir des Idrissides sous le règne de Mohamed ben Idris qui désigna son frère Abdallah ben Idris gouverneur sur les montagnes des Massmoudas et le Souss . la ville d’Aghmat fut sa résidence.
Etant sous la direction d’Aghmat, Taroudant perdit son rôle de capitale régionale et de résidence des gouverneurs. Cependant elle conserva son importance commerciale en dominant les axes du commerce de l’or qui reliaient le Maroc à l’Afrique subsaharienne. Cette position explique la préoccupation des Bourghwatas à rétablir leur pouvoir sur Taroudant après plus d’un siècle sous le pouvoir Idrisside.
Taroudant revint de nouveau à sa doctrine Kharijite sous le pouvoir des Bourghwatas vers la fin du troisième siècle de l’hégire et jusqu’à la moitié du quatrième où la doctrine chiite s’y propagea avec l’aide et la bénédiction des Fatimides. Peu à peu, la ville se transforma en île chiite au milieu des tribus Sunnites ce qui explique la contradiction des nouvelles de la ville.
· Sous la domination almoravide :
Les tribus soussies, sous l’influence des fkihs sunnites de Jazoula et à leur tête, le cheikh Ouajaj Ibn Zalou Lamti, usèrent de tous les moyens pour confiner leurs ennemis Bajalis chiites à Taroudant.
Quand Abdallah Ibn Yassine Al Jazouli, disciple de Ouajaj Ibn Zallou réussit à unir les tribus de Senhaja dans le cadre du mouvement Almoravide, il arriva avec l’aide de son allié Abou Baker Ibn Omar Lamtouni à soumettre le Tafilalt, puis le Souss, d’autant plus que les religieux le pressaient d’écraser les chiites de Taroudant. Il y parvint en l’an 448 de l’hégire (1056). Ainsi Taroudant redevint sunnite sous l’influence des Almoravides et connut une stabilité politique et un essor économique et urbaniste. Elle devint aussi un centre administratif qui permit aux Almoravides de contrôler la plaine du Souss et les montagnes de « Darn ». Tamime, fils de Youssef Ibn Tachafine, y fut nommé Wali. Dés lors, la ville de Taroudant reprit son rôle de carrefour des routes commerciales venant du Sud, ce qui attira des gens d’origines diverses : Andalous, noirs africains...
Sous le règne de Youssef Ibn Tachafine et son fils Ali, elle fut fortifiée par la construction de remparts et la mise en valeur des terres agricoles.
Elle devint aussi une base militaire avancée pour la surveillance des tribus Masmouda du Haut Atlas, lieu de stationnement de l’armée Almoravide qui combattait les adeptes d’ Ibn Toumert au début de l’avènement des Almohades.
· Sous les Almohades :
La fin de la dynastie des Almoravides fut une époque de conflits pour la ville de Taroudant : après la mort d’Ibn Toumart, son successeur Abdel Moumen Ibn Ali Al Goumi continua sa guerre d’usure contre les forces Almoravides dans le Souss. Les Almohades réussirent à entrer une première fois à Taroudant en l’an 528 de l’hégire mais ils la prirent définitivement en 535 de l’hégire (1140). Avec la capitulation de Taroudant, toutes les tribus du Souss se soumirent aux Almohades.
En 550 de l’hégire, Abdelmoumen visita Taroudant lors de son voyage dans le Souss. Il choisit cette ville pour rencontrer les délégations des tribus berbères environnantes.
Taroudant, connut par la suite, une stabilité politique et un essor économique. Elle reprit son rôle de capitale administrative du Souss. Les Almohades en firent le lieu de résidence de leurs Walis et une base militaire pour la surveillance de toute la région. Le Wali fut toujours, un membre de la dynastie ou une personnalité dévouée, Abdel Moumen y désigna même son fils Abdel rahman. Avec la sécurisation des routes, le commerce se développa, l’agriculture et l’artisanat prospérèrent. La ville laissa une impression favorable à ses visiteurs historiens et grands voyageurs tels Charif AL Idrissi et Ibn Idari.
D’après le professeur Ahmed Bouzid, Taroudant aurait connu un grand essor urbaniste, dont les monuments auraient été détruits lors de la rébellion de Ali Ibn Yeder Zagandari qui occupa la ville de 651 à 665 de l’hégire (1253-1266).
· Sous les Mérinides et les Ouatassides :
Les Mérinides prirent la ville en 668 de l’hégire. Ils réussirent à éliminer le rebelle Ibn Yeder, mais sans parvenir à mettre fin à son mouvement de rébellion ce qui nécessite l’envoi d’expédition militaire pour mater la rébellion et assurer la sécurité dans la région du Souss. Ces expéditions étaient dirigées contre les tribus de bani Yeder installés à Taroudant et contre les arabes de Maakil qui contrôlaient les axes routiers. Ce fut le cas des expéditions militaires de 671, 673, 681 et 683 de l’hégire et plus tard en 751 à l’époque su Sultan Abou Al Hassan et de son successeur Abou Inane en 756 qui réussit finalement à s’assurer l’allégeance de Taroudant jusqu’à sa mort en 759 de l’hégire.
Taroudant demeura néanmoins, malgré les troubles de cette période la capitale du Souss sur les plans politique administratif et économique. Elle fut le lieu de résidence du vice roi mérinide ou la capitale de bani Yeder selon les périodes d’influence des uns ou des autres. Ce qui aura des incidences sur le plan urbaniste. Les Mérinides s’attachaient à construire alors que les rebelles s’efforçaient de détruire.
Les Ouattassides ne réussirent pas à étendre leur influence jusqu’au Souss. Ainsi Taroudant demeura depuis la fin de la dynastie Mérinide indépendante de tout pouvoir centralisé.
Mais elle pâtît beaucoup de sa soumission aux tribus arabes qui dominèrent les plaines du Souss et qui imposèrent une dîme aux habitants en contre partie de la sécurisation des routes commerciales.
Il est difficile de dresser un tableau de la situation de la ville de Taroudant pendant cette période caractérisée par des troubles dans la région et dans l’ensemble du pays. Mais on peut admettre que la ville demeura fidèle à son rôle de pôle politique économique et administratif. Ibn Khaldoun parle du développement de la culture de la canne à sucre, Hassan AL Ouazane (Léon l’Africain) parle de l’essor de l’artisanat et de sa diversité dans la ville qu’il qualifie de « magnifique » et dont les habitants étaient « très civilisés ». La ville, étant indépendante de tout pouvoir centralisé sut se forger un système politique original et élaboré. Hassan AL Ouazane rapporte que la ville était gouvernée par quatre notables qui se relayaient au pouvoir tout les six mois. Les habitants, ajouta-t-il « étaient pacifiques et ne nuisaient pas à leurs voisins ».
Malgré cela, la ville souffrit de la crise du commerce caravanier occasionnée par le blocus imposé par les portugais sur le littorale Atlantique depuis l’occupation de la ville de Ceuta en 818 de l’hégire (1415) surtout sur les voies commerciales maritimes du Sous (Agadir et Massa).
C’est ce qui amena les tribus du Souss à prêter allégeance aux Saadiens qui pêchaient la guerre sainte contre les occupants étrangers en 916 de l’hégire 1510. Les habitants prêtèrent allégeance aux Saadiens en 920 de l’hégire (1515).
Sous cette dynastie, la ville de Taroudant connaîtra sa période la plus glorieuse. Elle se situera au niveau des pôles qui marquèrent la civilisation Marocaine, à savoir Fès et Marrakech.