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Bataille des Trois Rois

Bataille des Trois Rois

Bataille des Trois Rois
Informations générales
Date 1578
Lieu Oued Makhazine à coté de Ksar el-Kébir
Issue Victoire Marocaine décisive
Belligérants
Royaume du Maroc (dynastie Saadienne) L'armée chrétienne du Royaume du Portugal + l'armée marocaine du roi déchu el-Mottouakil
Commandants
Abu Marwan Abd al-Malik Sébastien Ier et Mohammed el-Mottouakil
Forces en présence
Inconnues Inconnues
Pertes
Inconnues Inconnues
Tentative Portugaise de conquérir le Maroc
 


La bataille des Trois Rois eu lieu en 1578 dans l'Oued Makhzen à Ksar el-Kébir au nord du Maroc entre les armées musulmanes du sultan Marocain Abu Marwan Abd al-Malik et de Moulay Mohammed, comprenant en plus des cavaliers marocains, des artilleurs turcs et des arquebusiers andalous, et l'armée "chrétienne" dirigée par Sébastien Ier, roi du Portugal comprenant également des Espagnols, des Italiens et des Allemands. Cette bataille se solda par une victoire nette du sultan, mais ces trois rois y trouvèrent la mort.

 

Préparation

En 1578, Sébastien Ier, rassemble dans le petit port de Lagos une armée chrétienne forte de dix-sept mille hommes pour conquérir le Maroc. Il peut compter sur l'alliance d'un prince marocain de la dynastie saadienne, Mohammed el-Mottouakil qui, chassé du pouvoir par son oncle, espère le regagner grâce au soutien des Portugais. De plus les portugais sont installés depuis longtemps dans plusieurs places fortes côtières : Ceuta, Tanger, Mazagan. Partie de Lisbonne le 24 juin, débarquée à Arzila (Asilah), l'armée de Sébastien s'enfonce dans les terres à la rencontre de son adversaire, Moulay Abu Marwan Abd al-Malik...

Déroulement

La bataille a lieu le 4 août au voisinage de la rivière Oued Makhzen.

La conclusion

Après avoir un moment cru en la victoire, les 23 000 Portugais sont mis en déroute par 40 000 Marocains et, chose tenue pour inouïe et mémorable par tous les chroniqueurs, les trois rois engagés dans le combat y trouvent la mort. « C'est un grand secret de Dieu que moururent, en l'espace d'une heure, trois grands rois dont deux étaient si puissants », écrit, deux semaines après l'évènement, le médecin juif de Abd al-Mâlik. Un captif portugais, détenu à Fès, souligne l'extraordinaire d'un « évènement si nouveau et insolite, jamais vu ni jamais raconté dans aucune histoire du monde, de la mort de trois grands rois en une rencontre, l'un du côté des vainqueurs et deux du côté des vaincus ». À l'autre extrémité du monde méditerranéen, en Asie mineure, au cœur de l'Empire ottoman, le chroniqueur al-Djannâbi lui fait écho en déclarant : « Dans nulle autre bataille on ne vit, comme dans celle-là, périr trois rois à la fois. Louange à Dieu et à ses volontés. »

Conséquences

« Au point de départ, un évènement : une guerre qui présente l'économie d'une tragédie classique. Elle se joue en quelques heures, en une seule bataille, qui s'achève par une victoire éclatante des Marocains sur le Portugal. Trois princes trouvent la mort au cours de l'affrontement. Guerre meurtrière, une des plus sanglantes du XVIe siècle, elle marque un tournant décisif dans l'histoire du face-à-face entre islam et chrétienté. On sut partout qu'elle resterait gravée dans les mémoires.

« Pour les chroniqueurs arabes, enrôlés au service du vainqueur, Ahmed al-Mansur Saadi, qui était le frère du roi mort, il s'agit de construire une mémoire officielle exaltant la victoire sur les chrétiens mais marquant également l'indépendance du prince saadien vis-à-vis du sultan ottoman.

Disputée entre le monarque et le saint, la mémoire de la bataille des trois rois suscite en terre marocaine une pluralité de récits : historiques, hagiographiques, folkloriques. Mais, curieusement, elle ne fait l'objet d'aucune célébration. Seules les communautés juives établies dans le nord du pays et habitées par le ressentiment contre ceux qui les ont expulsées de la péninsule ibérique fêtent la défaite du roi Sébastien lors du Pûrim de los cristianos, le premier eloul de chaque année.

Le texte biblique est mobilisé pour donner la signification de l'évènement : la dévastation de la communauté juive de Marrakech par Muhammad al-Mutawakkil est identifiée à la destruction du Temple, le roi Sébastien au Haman du Livre d'Esther qui a décidé l'extermination de tous les juifs, sa défaite à l'exécution de ce dernier. Comme Pûrim célèbre l'éloignement de la menace de destruction qui pesait sur Mardochée et les siens, le nouveau pûrim, institué par les rabbins après la bataille de 1578 (5338 dans le calendrier juif), rend grâce à Dieu d'avoir détourné un péril mortel.

Au Portugal, les lendemains de la défaite sont ceux du refus de mémoire. Ce n'est qu'en 1607 qu'est publiée la première relation en portugais de la bataille qui jusqu'alors n'avait fait l'objet que de textes manuscrits, accusant le roi de légèreté et d'imprudence. Malgré les inhumations réitérées de Sébastien (à Ksar el-Kébir au lendemain de la bataille, à Ceuta, dans l'église des Trinitaires, en décembre 1578, à Belem, dans le couvent des Hiéronymites en novembre 1582), la croyance s'installe que le roi n'a point été tué sur le champ de bataille et qu'il fera retour, restaurant la grandeur du Portugal. Après d'autres, Lucette Valensi s'attache à comprendre le mystère du sébastianisme, ce messianisme puissant et durable qui convertit en mythe central de l'identité nationale le souvenir d'un roi vaincu.

Elle en montre les raisons : l'incertitude sur le sort du roi au soir de la défaite, l'opposition au roi d'Espagne qui, en 1580, s'est emparé de la couronne du Portugal laissée sans héritier, l'impossibilité du travail du deuil pour ceux restés en terre africaine. Le retour attendu, prophétisé du roi donne force à l'espérance : ceux que l'on dit morts ne le sont peut-être pas, et le royaume ne saurait demeurer longtemps entre des mains étrangères. Elle en marque, aussi, les récurrences : au Portugal où les faux Sébastien se multiplient jusqu'au début du XVIIe siècle et où la croyance prophétique resurgit dans chaque moment de crise (par exemple dans les années qui précèdent 1640 et le retour à l'indépendance ou lors de l'occupation des troupes napoléoniennes), mais aussi au Brésil où le mythe prend au XIXe siècle la dimension d'une protestation sociale et d'une promesse eschatologique.

Le travail de la mémoire sur la bataille de 1578 ne se réduit cependant pas au sébastianisme, aussi important soit-il. À partir de lui, c'est toute l'histoire portugaise qui peut être pensée et écrite. Comme son roi, la nation et son peuple connaîtront la restauration de leur grandeur après le temps des épreuves voulu par Dieu.

Chez les chroniqueurs du XVIIe siècle, jamais ne faiblit la certitude dans le triomphe du Portugal, nouvel Israël, qui fondera le cinquième empire de la prophétie de Daniel. De là ce paradoxe, sans doute unique, qui lit dans une défaite accablante où le royaume perd son prince, sa noblesse et son indépendance, les signes indubitables d'une élection. Par un paradoxe quasi inverse, ce n'est que fort tard, après l'indépendance, que le Maroc réinventera la victoire de l'Oued Makhzen comme une date et un lieu qui fondent l'histoire nationale. L'interprétation en demeure d'ailleurs, comme dans les temps anciens, disputée entre la monarchie et les religieux. »



12/10/2007
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