Les dynasties marocaines
Les dynasties marocaines
Dynastie Idrisside (788-974)
L'histoire des Idrissides commence, lorsqu'un prince arabe de la famille de Ali (quatrième calife de l'islam) accompagné par son frère de lait Rached Ben Morched El Koreichi, se réfugièrent dans le Moyen Atlas. Fuyant la menace des Abbassides (le massacre de la bataille de Fakh près de La Mecque), ils séjournèrent en Égypte avant de s'installer à Walilah (volubilis), sous la protection de la tribu berbère des Awarbas. Réussissant à rallier les tribus à sa cause, il fut investi Imam et fonda la ville de Fès en 789 sous le nom d'Idriss Ier. C'est le début de la dynastie des Idrissides. Depuis cette date, le Maroc n'a jamais totalement perdu son indépendance. Il a préservé jusqu'à nos jours son identité nationale.
Idris Ier est assassiné par un émissaire du calife Abbasside Haroun al-Rachid. Ne se doutant point que la femme d'Idris Ier Kenza était enceinte, Haroun al-Rachid pensa que la menace a été vaincue. Mais quelques mois plus tard, Idris II était né. Son éducation a été confiée à l'affranchi de son père Rachid. 11 années plus tard, il fut proclamé roi du Maroc. Au fil des années, sa sagesse et son sens pour la politique s'affirme, il réussit à unifier un plus grand nombre de tribus, le nombre de ses fidèles s'accroît et la puissance de son armée se développe. Se sentant à l'étroit à Walilah, il la quitta pour Fès, ou il fonda le quartier des Kairouanais sur la rive gauche (Idris Ier s'était établi sur la rive droite, le quartier des Andalous).
En 985, les Fatimides aidé par leur vassal Moussa ben Abi-l-Afiya chassèrent les Idrissides. Ces derniers embrassèrent la cause des Omeyyades du califat de Cordoue et se réfugièrent en Andalousie.
Les Almoravides et l'empire marocain (974-1147)
Les Almoravides sont issus des tribus berbères sanhajas du désert mauritanien. C'étaient des tribus guerrières doublées d'un puissant mouvement religieux qui avait pour but d'instaurer l'islam sunnite de rite malékite dans tout l'Occident musulman (Al-Andalus et Afrique du Nord). Les Almoravides sont partis des actuels confins mauritano-maliens, se sont emparés du riche royaume du Ghana avec tout l'or qu'il produisait, sont parvenus à remonter les pistes caravanières vers le nord, jusqu'au Tafilalt dans les années 1050. Ils avaient pour chef Abou Bakr al Lamtouni puis Youssef Ben Tachfine. C'est ce dernier qui fonde Marrakech en 1062, au départ simple campement nomade destiné à devenir la capitale d'un empire. Les Almoravides font disparaître dans les régions qu'ils contrôlent toutes les doctrines qu'ils suspectent d'hérésie. C'est ainsi qu'ils mettent fin à la présence du chiisme dans la région du Souss et qu'ils détruisent le royaume Berrghouatta qui prospérait dans les plaines centrales du Maroc. Partout les Almoravides imposent le sunnisme malékite le plus strict, tel qu'enseigné par les écoles théologiques de Médine et de Kairouan. Cette unification religieuse se double d'une unification politique. Les Almoravides étendent ainsi leurs conquêtes jusqu'au Maghreb central. En 1086 Youssef Ben Tachfine, appelé par les roitelets musulmans d'Al Andalus, franchit le détroit de Gibraltar à la tête de ses forces sahariennes et parvient à briser l'offensive chrétienne des Castillans et des Portugais à Zallaqa. Les Almoravides mettent fin au règne chaotique des roitelets et unifient l'Andalousie musulmane, qui est incorporée à leur empire à partir de 1090. Youssef Ben Tachfine, qui a pris le titre d'Emir des Musulmans, règne sur un ensemble géopolitique s'étendant du Sénégal jusqu'aux abords des Pyrénées et des côtes atlantiques jusqu'à Alger. Cette domination almoravide se manifeste dans le domaine culturel par une symbiose des identités andalouse, ouest-maghrébine et saharienne, préparant la voie à l'émergence d'une civilisation hispano-mauresque. Dans le domaine économique, l'Etat almoravide se distingue par sa maîtrise des flux de l'or, dont il contrôle les zones de production et les voies d'acheminement, du Ghana au bassin méditerranéen. Après la mort de Youssef Ben Tachfine en 1106, son fils Ali lui succède, mais déjà la dynastie est contestée aussi bien en Espagne qu'en Afrique.
Almohades (1147-1248)
Les Almohades (al Muwahiddines) sont à l'origine un mouvement religieux fondé par le mystique Ibn Tûmart (qui s'autoproclamait Mahdi et Imam impeccable). Ibn Tûmart était un Berbère qui avait longtemps séjourné au Moyen-Orient, et aurait rencontré personnellement le fameux théologien persan al Ghazali. De retour dans sa région d'origine (le Haut-Atlas) en 1125 Ibn Tûmart impose une doctrine intransigeante qui entend "purifier les mœurs". Il prend pour cible la dynastie almoravide, jugée selon lui hérétique. Le mouvement almohade prend de l'ampleur et Ibn Tûmart contrôle bientôt toute la montagne depuis son nid d'aigle de Tinmel. Le meilleur disciple d'Ibn Toumert est un Zénète de Nedroma qui se nomme Abd al-Mumin. Accepté par les Masmoudas du Haut-Atlas, il prend la tête du mouvement à la mort de son maître et devient le premier véritable souverain almohade. Almoravides et Almohades se livrent à d'incessantes batailles, les Almoravides employant une milice de mercenaires chrétiens menés par le chevalier catalan Reverter. Les Almohades ont à leur disposition une armée tribale solidement organisée par une discipline de fer. Mais l'Emirat almoravide traverse une période de crise, et le Maghreb tombe comme un fruit mûr aux mains des Almohades. Marrakech sera prise en 1147 et presque tous les monuments almoravides y seront rasés, dans un souci de "purification".
Abd al-Mumin prend le titre de calife, rompant ainsi avec les Abbassides de Bagdad et imposant l'idée d'un califat berbère indépendant. Lui et ses successeurs Abu Yaqub Yusuf et Abu Yusuf Yaqub al-Mansur agrandissent l'empire almohade par les conquêtes du Maghreb oriental (jusqu'en Tripolitaine) et d'Al-Andalus. L'Etat almohade devient une puissance majeure du monde méditerranéen, et ses trois capitales : Marrakech, Rabat et Séville, connaissent l'apogée culturelle et artistique de la civilisation hispano-mauresque. Le commerce, les productions agricoles et artisanales sont florissantes, et les ports nouent des relations avec les villes commerçantes italiennes. Mais après ce sommet de gloire viendra le déclin avec le calife Muhammad an-Nasir, vaincu par les croisés à Las Navas de Tolosa en 1212. L'empire almohade commencera à se désagréger, laissant la place aux quatre entités politiques de l'Occident musulman : les royaumes de Fès (Mérinides), Tlemcen (Zayyanides), Grenade (Nasrides) et Tunis (Hafsides).
Mérinides (1248-1465)
Dynastie Wattasside (1465-1555)
Les Wattassides ou Ouattassides ou Banû Watâs viennnent d'une tribu de berbères Zénètes, comme les sultans Mérinides. Ces deux familles étaient apparentées et les Mérinides ont recruté de nombreux vizirs chez les Wattassides. Les vizirs wattassides s'imposent peu à peu au pouvoir. Le dernier sultan mérinide est détroné en 1465. Il s'en suit une période de confusion qui dura jusqu'en 1472. Le Maroc se trouve coupé en deux avec, au sud, une dynastie arabe émergeante, les Saadiens, et au nord le sultanat wattasside.
En 1472, les Mérinides ont perdu tous leurs territoires stratégiques et n'ont plus le contrôle du détroit de Gibraltar. Les Portugais prennent possession de Tanger en 1415 et le céde à l'Angleterre en 1661 comme dot apportée par Catherine de Bragance à son époux Charles II d'Angleterre. A l'époque où Tanger était encore une ville portugaise, elle fût la capitale de l'Algarve d'Afrique, car n'oublions pas qu'il y avait deux Algarves à l'époque, une en Europe et une autre en Afrique. Ceuta a été prise par les Portugais en 1415, et Melilla par les Espagnols en (1497). Le Maroc connait alors la période la plus sombre de toute son histoire.
Les Wattassides donnent finalement le pouvoir à une dynastie se réclamant d'une origine arabe chérifienne (les Saadiens) en 1554.
Saadiens (1555-1659)
Les sultans Alaouites (de 1636 à nos jours)
L'un des plus illustres Alaouites est le sultan Moulay Ismail, deuxième souverain de la dynastie. Son règne se situe entre 1672 et 1727. Moulay Ismail succède à son frère Rachid, mort accidentellement à Marrakech. Le sultan impose l'autorité du makhzen sur l'ensemble de l'Empire chérifien, grâce à son armée composée de milices d'esclaves-soldats noirs (les Abid al Bokhari) et des tribus militaires guich (Oudayas, Cherrardas, Cherragas). Le makhzen ismailien est une formidable machine administrative qui contrôlait le pays depuis Meknès, nouvelle capitale impériale en remplacement de Fès et de Marrakech. Sous le règne d'Ismail Meknès se dote d'une véritable Cité interdite à la marocaine, avec ses ensembles de palais, de bassins, de mosquées, de jardins et de forteresses. On a longtemps comparé Ismail à Louis XIV, par ailleurs le sultan marocain entretient une correspondance suivie avec le roi de France, auquel il demande la main de sa fille, la princesse de Conti. Demande qui sera rejetée par Versailles. Ismail mène une guerre continuelle contre les tribus récalcitrantes de l'Atlas (qu'il finit par soumettre) mais aussi contre les ennemis extérieurs : les Espagnols, les Anglais et les Ottomans. Le sultan étend l'autorité chérifienne sur la Mauritanie et les oasis du Touat. De 1727 à 1757 le Maroc connaît une grave crise dynastique au cours de laquelle les Abid al Bokhari font et défont les sultans, tandis que les tribus guich se soulèvent et razzient les villes impériales. Les autres tribus profitent de l'anarchie pour entrer en dissidence (siba). L'ordre est rétabli par Mohammed III (1757-1790) qui restaure l'autorité du makhzen et ouvre le Maroc sur le monde. Des traités sont conclus avec les principales puissances européennes, qui entretiennent des consulats et des maisons de commerce dans les nouveaux ports marocains de l'Atlantique fondés par Mohammed III. L'exemple le plus connu est Mogador (Essaouira) conçue par un ingénieur français travaillant pour le sultan. Moulay Suleiman (1792-1822) mène au contraire une politique isolationniste. Sur le plan interne sa politique provoque des révoltes tribales et urbaines, liées à sa décision d'interdire les moussems et le maraboutisme.